Irouleguy : un territoire d’oeno-rando

Dans le coin le plus au sud-ouest, à l’ombre des Pyrénées, s’étendent les vignobles pittoresques d’Iroulèguy, l’A.O.C. du Pays Basque. Les vignerons de l’Irouléguy ont en commun un défaut qui deviendrait une qualité : l’entêtement. L’irouléguy est l’un des plus petits vignobles de France, le seul ….

…. du pays basque français. En effet, il en a fallu de la ténacité, mais aussi de la passion et du courage pour dompter les pentes abruptes de l’Arradoy et du Jara et pour donner enfin à ce petit vignoble de montagne ses lettres de noblesse. « Un vin qui fait danser les filles… », disait Curnonsky (gastronome et écrivain français)…

Irouléguy est le plus petit vignoble de France et d’Europe

Le vignoble d’Irouléguy se situe au cœur du Pays Basque, en province de Basse Navarre. C’est l’un des plus petits vignobles de France, avec ses 232 ha répartis sur 12 communes autour de Saint Etienne de Baïgorry et Saint Jean Pied de Port. Il est exploité par une cinquantaine de viticulteurs, et produit environ un million de bouteilles par an.

Il est implanté sur les flancs Sud des montagnes, à une altitude comprise entre 200 et 450 m, sur des fortes pentes, qui peuvent atteindre jusqu’à 80 %. De ce fait, les 2/3 du vignoble sont cultivés en terrasses, qui suivent les courbes de niveau. L’aire d’appellation Irouléguy a été déterminée parcelle par parcelle.

Elle recouvre un peu plus de 1200 ha, répartis sur 15 communes : Anhaux, Aincille, Ascarat, Bidarray, Bussunarits-Sarrasquette, Bustince-Iriberry, Irouléguy, Ispoure, Jaxu, Lasse, Lecumberry, Ossès, St Etienne de Baigorry, St Jean le Vieux, et St Martin d’Arrossa.

On rencontre dans l’appellation Irouléguy de nombreux types de sols qui s’organisent autour de trois grandes familles : les sols légers sur grès rouges du Trias, les sols argileux sur ophite du Keuper, et les sols calcaires, plus minoritaires. Les cépages, pour la plupart d’origine locale, les sols rocailleux et le microclimat sont à l’origine des vins puissants et généreux, caractéristiques de l’appellation Irouléguy. Ils se répartissent en existe trois types : rouges (49%), rosés (36%), et blancs secs (15%).

Les rendements sont faibles, avec environ 40 hectolitres par hectare en moyenne, bien en dessous de ceux autorisés dans le décret d’appellation (50 en rouge et en rosé, et 55 en blanc). Les vignes sont cultivées en hautains, sur des palissages, ce qui permet de limiter les risques de gel printanier et les conséquences de la pluviométrie relativement importante.

La méthode de taille utilisée est la taille Guyot, simple ou double.

Histoire d’un vignoble liée au pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle

C’est vraisemblablement avec l’occupation romaine que la viticulture est apparue au Pays Basque, au IIIème siècle, accompagnée du mot « Migna » (« vigne » en basque).

Au XIIème siècle, les moines de l’Abbaye de Roncevaux implantèrent un vignoble autour des prieurés d’Irouléguy et d’Anhaux. Le vin qui en était issu apportait du réconfort aux pèlerins en chemin pour St Jacques de Compostelle. Le vignoble connût un fort développement à partir du XVIème siècle, sous l’impulsion du Vicomte d’Urdos.

Vers 1850, il produisait de quoi donner des forces à l’ensemble de la population ouvrière du bassin. Le vin d’Irouléguy était également expédié du port de Bayonne à destination de l’Allemagne, de l’Angleterre et des Pays-Bas. Au début du XXème siècle, dans les cantons de Saint Jean Pied de Port et de Saint Etienne de Baigorry, le vignoble s’étendait sur près de 1700 ha.

Malheureusement, le phylloxera, l’arrêt de l’activité minière, le déclin démographique et le manque de bras pour vendanger suite à la 1ère guerre mondiale eurent raison d’une grande partie de ce vignoble. La réputation du vin demeura cependant intacte, ce qui lui valut de figurer sur un menu de réception du Président Poincare, et dans l’ouvrage « La France Gastronomique », dans lequel l’écrivain gastronome Curnonsky indiquait en 1922 avoir trouvé des vins délicieux à Irouléguy.

Le premier syndicat de défense des vins d’Irouléguy fut créé le 17 décembre 1945 sur les communes de St Etienne de Baigorry, Anhaux et Irouléguy. Il obtint la mention « appellation Irouléguy », déjà utilisée depuis quelques années par quelques viticulteurs de cette commune. Cette étape marqua le début du renouveau du vignoble, qui franchit une nouvelle étape en 1952, avec la création de la Cave d’Irouleguy. Dans la foulée, les vins d’Irouléguy obtinrent l’Appellation VDQS le 23 janvier 1953.

En septembre 1963 l’aire géographique des vins d’Irouléguy fut étendue sur 6 communes supplémentaires. Lorsque les vins d’Irouléguy accédèrent à l’AOC, le 29 octobre 1970, le vignoble ne s’étendait que sur 55 ha. Mais grâce à cette reconnaissance et au travail sans relâche des viticulteurs, le succès des vins d’Irouléguy alla croissant.

Entre 1980 et 1995, une nouvelle génération reprit le flambeau, et les surfaces en plantation triplèrent, redonnant vie aux flancs escarpés du Jara et de l’Arradoy avec des vignes en terrasses. Une nouvelle extension de la zone d’appellation intervint en 1995, avec l’inclusion de 6 nouvelles communes, donnant à l’aire d’appellation ses contours actuels.

Depuis, les surfaces en plantation progressent à un rythme plus paisible, laissant à l’appellation le temps de conforter sa place dans le paysage viticole français et international.

Dégustation

L’irouléguy rouge (servir entre 17° et 20°) accompagne les viandes rôties ou en sauce, le gibier les fromages. Le blanc (servir entre 8°C à 10°C) se boit sur les poissons, les fruits de mer, le pain d’épices, les confitures…Le rosé (servir entre 9°C et 12°C) sur les poissons et les viandes grillés. Pour les néophytes, l’étiquette du rosé porte la mention Hotx hotxa edan qui vous invite à rafraîchir le vin avant de le servir.

Les Cépages

Noirs (environ 85% des surfaces de l’appellation)

  • Tannat (Bordelesa Beltza « le bordelais noir » en basque)
    Présent depuis plusieurs siècles dans le vignoble, d’où il est originaire, ce cépage est spécifique à l’extrême Sud-Ouest de la France. Il représente la majorité des surfaces de raisin noir de l’appellation. D’une productivité assez régulière, il confère aux vins la puissance caractéristique des Irouléguy, ainsi qu’un potentiel de garde important. Il apporte également des arômes de fruits rouges et noirs, de fleurs, et parfois des notes de café et de réglisse.
  • Cabernet Franc (Axeria «le renard » en basque)
    Présent depuis plusieurs siècles dans le vignoble, ce cépage, qu’on retrouve un peu partout en France et dans le monde, est peu productif. Il apporte finesse et élégance aux vins, et se caractérise par des arômes de fruits rouges et de foin.
  • Cabernet Sauvignon
    D’introduction récente dans le vignoble d’Irouléguy, ce cépage est répandu en France et dans le monde. Sa maturité tardive ainsi que sa faible productivité en font un cépage marginal dans l’appellation. Très riche, il apporte à la fois structure et volume aux vins, avec des arômes de cassis et parfois de piment.

Blancs (environ 15% des surfaces de l’appellation)

  • Gros Manseng (Izkiriota Haundia en basque)
    Cépage typique de l’extrême Sud-Ouest de la France, il représente la majeure partie des surfaces de raisin blanc de l’appellation, dans laquelle il existe depuis plusieurs siècles. Il apporte aux vins sa fraîcheur, son gras, et ses arômes d’agrumes caractéristiques.
  • Petit Manseng (Izkiriota Ttipia en basque)
    Présent dans l’appellation Irouléguy depuis plusieurs siècles, il se distingue de son cousin le Gros Manseng par une productivité beaucoup plus faible. Cépage le plus tardif de l’appellation Irouléguy, c’est l’un des plus riches, qui amène beaucoup de volume, de degré aux vins, avec des arômes de fruits exotiques, de pêche et d’acacia.
  • Courbu (Xuri Zerratia, « le blanc serré » en basque)
    Cépage peu répandu dans l’appellation, où il est pourtant présent depuis plusieurs siècles, on ne le retrouve quasiment nulle part ailleurs en France. Il vient à maturité bien avant les autres cépages blancs, en même temps que les cépages rouges. Très fragile, il présente un intérêt certain, de par la finesse et l’onctuosité qu’il apporte aux vins, accompagnées par des notes aromatiques souvent minérales.

Production

Deux types de productions très différents coexistent.

Vins d’Irouléguy

Le volume de production annuel se situe autour de 4 000 hectolitres, à partir des raisins d’une quarantaine de viticulteurs, sur 140 ha de vignes (soit 60% de l’appellation). Le vin est intégralement mis en bouteille sur place, dans nos installations. La production se répartit à 40% en vins rouges, 50% en vins rosés, et 10% en vins blancs.

Les rendements en AOC Irouléguy sont généralement faibles (40 hl/ha), compte tenu des conditions de production difficiles et de la recherche d’une qualité optimale du raisin. Deux gammes complètes de produits existent. L’une est destinée à la grande distribution, et la seconde à tous les autres réseaux de distribution.

Cuvées Rouges Rosés Blancs
Gamme GD
  • Arrola
  • Comte de Leispars
  • Elorri
  • Ainara
Gamme traditionnelle
  • Gorri
  • Kattalingorri
  • Mignaberry
  • Omenaldi
  • Argi
  • Kattalingorri
  • Mignaberry
  • Mignaberry
  • Xuri
  • Lehia

Vin de table

La production se situe autour des 200 hectolitres par an, à partir des raisins d’une centaine d’adhérents, sur 10 ha de vignes réparties sur tout le Pays Basque. Cette activité correspond essentiellement à une production d’agrément, et régresse d’année en année. Le vin de table est essentiellement destiné à la consommation locale, et conditionné en bag-in-box ou vendu en vrac.